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Médecin du travail (oui)

Revue Experts numéro 65 | Paru le : 02.01.2010

Cet arrêt est l'occasion de revoir la notion de secret professionnel du médecin. Dans le cas d'espèce, un médecin du travail refuse de communiquer à un médecin expert les renseignements contenus dans ses fiches en raison du secret professionnel, et ce, malgré une ordonnance expresse du magistrat de premier degré confirmée par la cour d'appel qui se fonde comme le premier juge sur les art. 141 du NCPC : « En cas de difficulté ou s'il est invoqué quelque empêchement légitime, le Juge qui a ordonné la délivrance ou la production peut, sur la demande sans forme qui lui en sera faite, rétracter ou modifier sa décision. Le tiers peut interjeter appel de la nouvelle décision dans les 15 jours de son prononcé. » Et 243 du NCPC : « Le technicien peut demander communication de tous documents aux parties et aux tiers, sauf au Juge, à l'ordonner en cas de difficultés. » La 1re chambre civile de la Cour de cassation casse cet arrêt et annule « sans renvoi » en rétractant l'ordonnance. Le raisonnement est très bref ; dès lors qu'il n'y a pas exception expresse édictée par la loi comme par exemple l'art. 901 du Code civil, « pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit », ou exception à l'art. 226-13 du Code pénal. L'article 226-13 du Code pénal dispose : « La révélation de l'information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. » L'article 226-14 du Code pénal dispose : « L'art 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable : 1) à celui qui informe les autorités judiciaires médicales ou administratives de privations ou de sévices y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes sexuelles dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur de 15 ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, 2) au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du Procureur de la République, les sévices qu'il a consta- tés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises. Aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée du fait du signalement de sévices par le médecin aux autorités compétentes dans les conditions prévues au présent article. » L'art. 226-14 est donc parfaitement clair, outre les exceptions qu'il exprime, il retient que le secret professionnel ne peut pas être opposé « dans les cas où la loi l'impose ou autorise la révélation du secret ». Il y a fort peu de lois qui imposent ou autorisent la transgression du secret médical, mais par exemple, une jurisprudence constante estime que le médecin traitant ou le psychiatre est délié du secret par l'art. 901 du Code civil « pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être saint d'esprit ». Dans le cas d'espèce, la compagnie d'assurances soupçonne que la réponse au questionnaire pour un contrat d'assurance vie adossé à un contrat de prêt n'était pas sincère. L'emprunteur est décédé. S'appuyant sur l'art 113-8 du Code des assurances : « Indépendamment des clauses ordinaires de nullité et sous réserve des dispositions de l'art. L132-26, le contrat d'assurances est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre. » Dans un arrêt du 9-6-1993, bull. civ. 1, n°214, la 1re chambre civile de la Cour de cassation avait estimé que la veuve de l'assuré bénéficiaire de l'assurance ne peut s'opposer à la production d'un certificat médical délivré à l'assureur par le médecin traitant où il est fait état d'un traitement médical (dissimulé lors de la souscription du contrat) mais sans aucun rapport avec l'affection ayant causé le décès. L'arrêt du 15-6-2004 opère un revirement total de cette jurisprudence en estimant que le juge civil ne peut en l'absence de dispositions législatives spécifiques, contraindre un médecin à lui transmettre des informations couvertes par le secret lorsque la personne concernée ou ses ayants droit s'y sont opposés. Nous approuvons cette nouvelle position prise par la Cour de cassation qui applique de façon très restrictive les exceptions au secret médical. À force d'accepter les exceptions, la règle se réduit comme une peau de chagrin. La tentation est alléchante avec les nouveaux systèmes de cartes à puce d'emmagasiner des milliers d'informations que la personne n'a pas nécessairement envie de révéler. C'est un sujet qui doit faire réfléchir chacun d'entre nous et notamment la commission nationale informatique et liberté sur les violations que peuvent entrainer ces dispositifs.

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